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Microbiote intestinal et résistance aux antibiotiques

Une étude européenne lève le voile sur la diversité des gènes de résistance aux antibiotiques présents dans les bactéries du microbiote intestinal. Des équipes des hôpitaux Beaujon et Bichat Claude-Bernard AP-HP, de l’Inra (MetaGenoPolis), de l’Institut Pasteur, de l’Inserm, des universités Paris Diderot et Paris Saclay ont développé une nouvelle méthode bioinformatique de prédiction de fonction des gènes basée sur la structure tridimensionnelle des protéines qu’ils codent.

 

Les chercheurs, en collaboration avec d’autres équipes européennes, l’ont ensuite appliquée à un catalogue de plusieurs millions de gènes du microbiote intestinal. Grâce à cette méthode, ils ont identifié plus de 6 000 gènes de résistance aux antibiotiques très différents des gènes connus. Ces travaux, publiés dans la revue Nature Microbiology, illustrent la diversité des gènes de résistance des bactéries de notre microbiote intestinal.

 

Afin d’établir le recensement des gènes de résistance aux antibiotiques dans le microbiote intestinal, il n’était pas possible de se baser seulement sur la similarité de séquence de l’ADN. En effet, l’ADN des bactéries intestinales est bien différent de celui des bactéries connues, ce qui n’est pas sans poser des difficultés aux outils de prédiction des fonctions des gènes basés sur la similarité avec les séquences d’ADN connues (représentées par des lettres).

 

Deux gènes aux fonctions identiques peuvent avoir deux séquences d’ADN très différentes alors que les structures tridimensionnelles des protéines qu’ils codent sont superposables. Partant de ce constat, les chercheurs ont développé une méthode de prédiction de fonction des gènes basée sur la similarité de structure tridimensionnelle.

Cette méthode de prédiction tout à fait originale a permis d’identifier plus de 6000 gènes qui pourraient conférer une résistance aux antibiotiques, avec une moyenne de plus de 1000 gènes de résistance par individu.

Ces prédictions dites « in silico » ont pu être vérifiées au laboratoire sur certaines classes d’antibiotiques comme les bêta-lactamines. De plus, la composition en gènes de résistance était très liée à la composition en espèces bactériennes, et les chercheurs ont ainsi pu identifier six groupes d’individus en fonction de leurs gènes de résistance. Ces 6 groupes sont appelés “résistotypes” et sont connectés aux entérotypes décrits précédemment.

 

Cependant, la majorité de ces gènes de résistance n’ont jamais été retrouvés ni sur des éléments génétiques mobiles, ni dans des bactéries pathogènes, soutenant que leur transfert vers ces dernières est un évènement rare.

 

Les chercheurs ont également observé que l’exposition aux antibiotiques influait sur le contenu en gènes de résistance : une exposition courte et forte altérait la composition du microbiote intestinal et diminuait paradoxalement l’abondance des gènes de résistance. En revanche une exposition chronique était associée à une augmentation de l’abondance des gènes de résistance en parallèle ici aussi d’une altération de la composition du microbiote.

 

Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives quant au rôle des gènes de résistance du microbiote intestinal qui semblent, dans leur majorité, peu à risque d’être transférés vers des bactéries pathogènes, et qui pourraient être bénéfiques en protégeant leurs hôtes de l’impact des antibiotiques dans le microbiote intestinal puisque des bactéries non pathogènes seraient ainsi protégées.

 

En savoir plus

Le microbiote intestinal est composé de plusieurs centaines voire milliers d’espèces de microorganismes, principalement de bactéries. Ces dernières sont naturellement sensibles aux antibiotiques et pour s’en prémunir, certaines ont développé des mécanismes de résistance - les gènes qui les codent étant désignés « gènes de résistance aux antibiotiques ». Si les gènes de résistance aux antibiotiques portés par les bactéries pathogènes - comme le staphylocoque doré - sont bien connus, ce n’est pas le cas des bactéries intestinales en raison de la difficulté à les étudier. En effet, la plupart d’entre elles ne sont pas cultivables en laboratoire et les connaissances sur leurs propriétés sont largement basées sur le séquençage de leur ADN.

 

Prediction of the intestinal resistome by a three-dimensional structure-based method

Etienne Ruppé1,2, Amine Ghozlane1,3,4, Julien Tap1,16, Nicolas Pons1, Anne-Sophie Alvarez1, Nicolas Maziers1, Trinidad Cuesta5, Sara Hernando-Amado5, Irene Clares5, Jose Luís Martínez5, Teresa M. Coque6,7,8, Fernando Baquero6,7,8, Val F. Lanza6,7, Luis Máiz9, Tiphaine Goulenok10, Victoire de Lastours2,10, Nawal Amor10, Bruno Fantin2,10, Ingrid Wieder11, Antoine Andremont2,11, Willem van Schaik12,13, Malbert Rogers12, Xinglin Zhang12, Rob J. L. Willems12, Alexandre G. de Brevern14, Jean-Michel Batto1, Hervé M. Blottière1, Pierre Léonard1, Véronique Léjard1, Aline Letur1, Florence Levenez1, Kevin Weiszer1, Florence Haimet1, Joël Doré1, Sean P. Kennedy1,4 and S. Dusko Ehrlich1,15

1. MGP MetaGénoPolis, INRA, Université Paris-Saclay, Jouy en Josas, France

2. IAME, UMR 1137, INSERM, Université Paris Diderot, Paris, France

3. Institut Pasteur - Bioinformatics and Biostatistics Hub - C3BI, USR 3756 IP CNRS, Paris, France

4. Institut Pasteur - Biomics - CITECH, Paris, France

5. Centro Nacional de Biotecnología, CSIC, Madrid, Spain

6. Servicio de Microbiología Instituto, Ramón y Cajal de Investigación Sanitaria, Madrid, Spain

7. CIBER en Epidemiología y Salud Pública, Madrid, Spain

8. Unidad de Resistencia a Antibióticos y Virulencia Bacteriana, Madrid, Spain

9. Unit for Cystic Fibrosis, Ramon y Cajal University Hospital, Madrid, Spain

10. Internal Medicine Department, Beaujon Hospital, AP-HP, Clichy, France

11. Bacteriology Laboratory, Bichat-Claude Bernard Hospital, AP-HP, Paris, France

12. Department of Medical Microbiology, University Medical Center Utrecht, Utrecht, the Netherlands

13. Institute of Microbiology and Infection, University of Birmingham, Edgbaston, Birmingham, UK

14. INSERM UMR_S 1134, Université Paris Diderot, Université de la Réunion, Université des Antilles, INTS, GR-Ex, Paris, France

15. Centre of Host Microbiome Interactions, King’s College, London, UK

16. Danone Nutricia Research, Palaiseau, France

 

Nature Microbiology, 26 novembre 2018

Doi : 10.1038/s41564-018-0292-6

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Le Laboratoire de Physique de l’Ecole Normale Supérieure (LPENS), créé le 1er janvier 2019, est un laboratoire de recherche fondamentale interdisciplinaire, en physique et ses interfaces. Les activités scientifiques du laboratoire couvrent un vaste...