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Quand l’avenir du climat se joue dans les airs

Avec l’essor du tourisme international, le trafic aérien explose et, avec lui, les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Peut-on enrayer, ou du moins limiter ce phénomène ? Arnaud Passalacqua, maître de conférences en histoire contemporaine à l’université Paris Diderot, spécialiste des transports et des mobilités et chercheur au Laboratoire Interdisciplinaires des Energies de Demain nous apporte son éclairage.

 

Le trafic aérien connaît depuis 1950 et le début de l’aviation commerciale une croissance exponentielle. « En 2017, 4,1 milliards de passagers ont pris les airs. Et aucun signe d’essoufflement n’est en vue », souligne Arnaud Passalacqua. Car pour l’heure, seuls 10 % à 15 % de la population mondiale l’utilisent. « Ce mode de transport reste coûteux et très inégalitaire. Ce sont en majorité les mêmes personnes qui l’utilisent à des fins professionnelles et touristiques. Les vols charters ne représentent encore qu’un quart de l’offre globale », poursuit le chercheur.

 

Plus néfaste que la voiture

Revers de ces déplacements : leur impact environnemental, à commencer par leur contribution au réchauffement planétaire. « Le transport aérien est responsable d’environ 3 % des émissions mondiales de CO2 mais de près de 5 % du réchauffement ! », indique Arnaud Passalacqua. Ce CO2 est en effet environ deux fois plus réchauffant que celui émis au sol par la voiture. Par ailleurs, dans la haute atmosphère, les oxydes d’azote produits par la combustion subissent des réactions chimiques qui contribuent, entre autres, à la formation d’ozone qui accentuent le réchauffement tout comme les trainées de condensation. Et bien des incertitudes demeurent. « Il est ainsi probable que la suie émise par les moteurs d’avion joue en sens inverse : en écrantant la lumière du Soleil, elle réduirait quelque peu l’impact climatique », insiste le chercheur.

 

Le pire à venir

Tout indique que ces émissions s’envoleront au cours des décennies à venir. Même si l’amélioration des performances des avions permet de diminuer les émissions par passager au kilomètre parcouru, la demande explose, poussée par l’élévation du niveau de vie des pays émergents. Or, constate l’historien, « le secteur aérien n’est pas directement inclus dans l’accord de Paris sur le climat. Il n’est donc concerné par aucun des mécanismes mis en place pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les vols internationaux échappent aussi pour des raisons historiques à toute fiscalité sur les carburants. » Certes, l’Association internationale du transport s’est engagée en 2016 à établir pour 2020 son propre plan de compensation des émissions de CO2 générées par la croissance du trafic « Mais cela sera insuffisant. La solution la plus sûre serait de voyager moins loin et moins souvent… », conclut le chercheur.

Laboratoire

Laboratoire Interdisciplinaire des Energies de Demain

Le LIED a pour objectif fondateur de développer « l’écologie des énergies », en menant à la fois recherches scientifiques et techniques guidées par les problèmes à résoudre dans le cadre de la transition énergétique.