Avec plusieurs dizaines de milliards d’emails expédiés chaque année dans le monde, le Web est devenu un outil de communication écrite incontournable. Mais sa sécurité laisse à désirer. Chercheur au sein de l’Institut de recherche en informatique fondamentale et spécialiste de la théorie de la complexité algorithmique, Sylvain Périfel étudie les problèmes algorithmiques qui peuvent parfois servir à la conception de nouveaux systèmes cryptographiques plus sûrs.
L’enjeu est de taille : mettre au point de nouveaux systèmes de cryptographie capables de sécuriser l’ensemble des échanges de données sur Internet, partout dans le monde. « La méthode de cryptographie RSA, créée dans les années 1970 et qui est la plus utilisée à ce jour, montre des signes de faiblesse, observe Sylvain Périfel. De nouveaux algorithmes plus puissants sont capables de “casser” le système. L’espionnage de communications est monnaie courante. Face à cette menace, il est impératif de mettre au point de nouvelles méthodes de cryptographie. »
L’apport de l’informatique quantique en matière de sécurisation des données sur le Net est prometteur. « Elle a pour éléments de base des qubits (et non des bits comme en informatique classique), soit un enchevêtrement de 0 et de 1, qui permettent de concevoir des algorithmes 100 % inédits et extrêmement puissants », explique le chercheur. D’autre part, une méthode de chiffrement totalement sûre, la cryptographie quantique, est déjà testée à petite échelle.
Ce procédé consiste à envoyer, depuis l’émetteur vers le récepteur, un faisceau lumineux codant des bits aléatoires. Il est capable de détecter une éventuelle « présence » indésirable (une personne cherchant à s’introduire dans la communication virtuelle) puis de coder et de rendre inintelligible à n'importe quel intru les données échangées. « Pour l’instant, ce système est efficient sur de courtes distances, quelques centaines de kilomètres seulement », précise Sylvain Périfel.
À plus court terme, les problèmes mathématiques complexes, dits NP-complets, sur lesquels planche le chercheur de l’IRIF, pourraient bien être la solution tant recherchée pour concevoir de nouvelles formes de cryptologie. « Nos travaux ont pour conséquence d’identifier des problèmes mathématiques tellement complexes qu’il n’existe pas d’algorithme capable de les “casser” », indique Sylvain Périfel. Certains de ces casse-tête, comme les réseaux euclidiens ou les systèmes d’équations polynomiales, sont déjà utilisés par les spécialistes en cryptologie pour concevoir de nouveaux systèmes plus sûrs : « Nous en sommes à l’étape de l’implémentation et de l’évaluation de leur robustesse avant une mise en application. »