Smogs : comprendre leur formation, pour sortir enfin du brouillard
Les aérosols organiques secondaires représentent une part importante des particules fines atmosphériques. Encore mal connus, ils sont l’une des principales sources d’incertitudes sur le changement climatique et la qualité de l’air. La chercheuse Aline Gratien les étudie depuis le Laboratoire Inter-Universitaire des Systèmes Atmosphériques mais aussi sur le terrain, avec l’organisme de surveillance de la qualité de l’air en Île-de-France.
Traquer les polluants atmosphériques, et plus particulièrement les aérosols organiques secondaires (AOS) : tel est l’objectif d’Aline Gratien. Formés dans l’atmosphère, ces aérosols résultent de l’oxydation photochimique des composés organiques volatils (COV) émis par les activités humaines ou naturelles. Ils correspondent à un ensemble de microparticules, solides ou liquides, en suspension dans l’air. « Les AOS, que l’on retrouve notamment dans les smogs, jouent un rôle important dans la dégradation de la qualité de l’air, de la santé et du climat », explique la chercheuse membre du Laboratoire interuniversitaire des systèmes atmosphériques (LISA).
Mais dans quelle mesure ? Aussi complexes que polymorphes, les AOS ont des propriétés et des impacts très variables qui sont loin d’avoir été tous identifiés. « Selon leur taille et leur composition, ils sont plus ou moins toxiques pour le système respiratoire. Ils absorbent ou diffusent aussi la lumière différemment, et ont donc un impact plus ou moins notable sur le bilan thermique et la qualité de l’atmosphère en réduisant la visibilité, poursuit la chimiste. Leur caractérisation moléculaire, encore très compliquée aujourd’hui, constitue un enjeu majeur pour comprendre la pollution atmosphérique. »
Des interactions entre les aérosols et les nuages
Depuis la chambre de simulation atmosphérique du LISA, Aline Gratien observe les mécanismes de formation et de vieillissement des aérosols. « Dans ce grand réacteur, nous recréons toutes sortes de conditions atmosphériques – des plus simples au plus complexes – de manière contrôlée. Nous avons par exemple pu étudier les interactions entre un aérosol d’origine naturelle et les nuages1 ou simuler la pollution à un endroit et à un jour donné. »
Au cours de ses recherches, elle s’est aussi intéressée aux COV de la famille des alcanes, largement libérés par les véhicules. « Jusqu’à récemment, on pensait que seules les molécules complexes, comme les hydrocarbures aromatiques, pouvaient conduire à la formation d’aérosols. Mais les alcanes, qui sont des composés simples, sont aussi des précurseurs d’AOS », explique la chercheuse.
Un partenariat avec Airparif
Au-delà de ces travaux de laboratoire, Aline Gratien participe à des expériences de terrain, notamment au sein du groupe de recherche OCAPI, en collaboration avec l’organisme de surveillance de la qualité de l’air en Île-de-France Airparif.
Depuis les deux stations de mesures in situ opérées par le LISA – l’une située à Paris-Diderot, l’autre à Paris-Est Créteil –, le laboratoire réalise lors d’épisodes de forte pollution des prélèvements et des analyses complémentaires à ceux effectués par Airparif. « Nous entrons en jeu pour étudier la composition chimique des aérosols, précise la chercheuse. Les premiers résultats de ce projet seront connus courant 2018. »
1http://www.insu.cnrs.fr/node/5689
Pour aller plus loin :
Le documentaire « Irrespirable », produit par ARTE, où le LISA apparaît :
http://boutique.arte.tv/f10763-irrespirable_villes_bord_asphyxie