Médecine
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Des virus de l’intestin prédictifs du risque de maladie du greffon contre l’hôte

Les équipes des services de virologie, d’hématologie-greffe de moelle osseuse et de biostatistiques de l’hôpital Saint-Louis, AP-HP, de l’Université Paris Diderot, de l’Inserm, en collaboration avec des scientifiques de l’Université de Californie à San Francisco (USA) ont découvert qu’un groupe de virus présents dans l’intestin peut déclencher l’apparition de la maladie du greffon contre l’hôte.

L’analyse du « virome » intestinal, la population de virus retrouvés au niveau du tube digestif, chez 44 patients recevant une greffe de moelle osseuse a révélé son rôle dans la survenue de cette maladie.

Ces résultats sont parus dans une lettre publiée dans Nature Medicine.

La maladie du greffon contre l’hôte (GvH) touche jusqu’à 60% des patients après une greffe de cellules souches (greffe de moelle osseuse) avec un fort risque de mortalité. Bien que des études antérieures aient identifié des biomarqueurs associés à la sévérité de la maladie, aucun d’entre eux n’est encore utilisé en pratique pour prédire la survenue de la maladie du greffon.

Les chercheurs ont mené une étude longitudinale en analysant le virome intestinal de  44 patients avant la greffe de moelle osseuse puis jusqu’à six semaines suivant la greffe. En utilisant des techniques de métagénomique à haut débit, ils ont séquencé les ADN et ARN présents dans les échantillons de selles afin d’analyser et de comparer la dynamique au cours du temps des populations bactériennes et virales.

Les résultats montrent que la GvH est associée à des modifications significatives des populations de bactéries, de bactériophages (c’est-à-dire les virus qui infectent les bactéries) et de virus présents dans les selles.

Chez les patients présentant une GvH digestive, les virus à ADN persistants (Anelloviridae, Herpesviridae, et Polyomaviridae) sont absents du tube digestif les 2-3 premières semaines post-greffe et augmentent ensuite de manière significative. Ces virus sont en revanche présents de manière stable dès la greffe chez les patients sans GvH.

Les chercheurs ont révélé en particulier la présence d’un groupe de virus ARN, les picobirnavirus (PBV), chez plus d’un tiers des patients après transplantation de cellules souches. Contrairement aux autres virus, la présence des PBV est prédictive du développement de la GvH  et fortement corrélée aux biomarqueurs de gravité de la maladie du greffon contre l’hôte digestive.

Les outils de métagénomique ont permis l’identification des PBV jusqu’alors peu étudiés, leur extrême variabilité rendant difficile la mise au point d’un test permettant de les détecter. Ces virus ont été décrits dans des cas de gastroentérites intestinales, notamment chez des patients atteints de SIDA sans que leur rôle pathogène ne soit établi. L’utilité potentielle des PBV comme marqueur prédictif de la GvH relance l’intérêt de développer des outils adaptés à la pratique clinique.

Ces résultats améliorent l’état des connaissances sur cette maladie complexe, notamment sur le rôle des infections virales dans les maladies inflammatoires digestives, et laissent entrevoir de nouvelles perspectives thérapeutiques.