Hommage
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Hommage à Maurice Nivat

C'est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès de Maurice Nivat.

Nommé, en 1969, professeur d'informatique à la faculté des sciences de Paris, il fait partie de la première génération des Professeurs de cette discipline. En 1971, il choisit, avec les professeurs Louis Nolin et Marcel-Paul Schützenberger, dont il fut l'un des premiers disciples, de participer à la fondation de l'université Paris 7 où il exercera jusqu'à sa retraite en 2001. Dès 1972, il fonde avec M.P. Schützenberger une équipe associée du CNRS sur le thème de l'informatique théorique centrée sur l'étude des langages formels, des automates et de la sémantique des langages et des programmes, activités qu'il animera parallèlement au sein de l'IRIA (qui allait devenir plus tard INRIA).

En 1975, cette équipe donne naissance au LITP (Laboratoire d'Informatique Théorique et de la Programmation) dont il assure la codirection avec le Professeur Jacques Arsac de l'université Paris 6. Ce laboratoire est le premier grand laboratoire d'informatique fondamentale créé en France, et lui ont succédé au sein de Paris 7 les laboratoires LIAFA (Laboratoire Informatique, Algorithmique Fondamentale et Automates), PPS (Preuves, Programmes et Systèmes), et aujourd'hui l'IRIF (Institut de Recherche en Informatique fondamentale).

C'est peu dire le rôle essentiel de Maurice pour la discipline informatique à Paris 7 qui s'est constituée en UFR au début des années 1980. Parallèlement à ses activités à Paris 7, Maurice s'est vu confier au milieu des années 1980, par Hubert Curien, ministre de la recherche et de la technologie, une mission pour le développement de la recherche en Informatique. Au travers de PRC (programmes de recherches coordonnées), il a permis la création de nombreux laboratoires d'informatique (Bordeaux, Toulouse, Lille pour n'en citer que quelques-uns), se battant pour leur permettre d'obtenir des équipements raisonnables (ce qui a donné lieu, à une époque où les VAX de Digital équipaient les universités américaines mais étaient bannies des françaises, à d'épiques combats que Maurice a su mener à bien). Cette action a largement contribué au tissage d'un véritable réseau national dans le domaine de l'informatique fondamentale.

Par ailleurs, afin de permettre aux jeunes chercheurs de la discipline de rencontrer les chercheurs plus expérimentés et d'élargir leur vision du domaine, il prit l'initiative de créer le rendez-vous annuel des Ecoles de Printemps en informatique (EPIT), qui continue de se tenir chaque printemps.

Au niveau européen, il a tissé un vaste réseau de chercheurs et a été un des fondateurs de l'EATCS (European Association of Theroretical Computer Science) et de la revue TCS (Theoritical Computer Science), ainsi que de la série de conférences ICALP (International Colloquium on Automata, Languages and Programming)

Le nombre impressionnant de docteurs en informatique dont il a dirigé les travaux et qui ont ensuite mené une carrière universitaire en France et dans le monde, témoigne à lui seul de l'importance et de la pertinence de son investissement. À la fin de sa carrière et durant sa retraite, Maurice a continué d'oeuvrer pour la discipline, s'investissant en particulier dans son introduction dans l'enseignement secondaire et dans les concours des professeurs.

L'informatique a perdu un de ses pionniers et une de ses grandes figures.